Mort d’une bête à la peau fragile by Patrick Alexander

Mort d’une bête à la peau fragile by Patrick Alexander

Auteur:Patrick Alexander [Alexander, Patrick]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 2017-03-13T00:00:00+00:00


CHAPITRE XII

Alice décida de faire une petite lessive et de ranger un peu l’appartement tout de suite après le dîner parce qu’une fille nommée Philippa, qui travaillait également dans le Service, devait passer plus tard dans la soirée prendre une tasse de café.

Philippa était une fille d’aspect chevalin originaire du centre de l’Angleterre, qui ne pouvait parler que de chasses à courre et de chiens de meute. Son autre centre d’intérêt, c’était les hommes, qu’elle pourchassait aussi impitoyablement, mais avec moins de succès, que les renards.

Alice, qui n’avait aucune sympathie pour elle mais avait bon cœur, l’avait invitée parce qu’elle était en proie au chagrin d’une idylle rompue, son dernier flirt l’ayant laissée tomber (pour un cheval, d’après une histoire qui circulait malicieusement dans le bureau).

Alice venait de mettre la bouilloire sur le feu quand un coup de sonnette retentit. Elle soupira, commença à regretter son invitation.

La sonnette tinta encore. Et continua à tinter.

— Voilà, j’arrive, cria Alice, irritée, et elle gagna la minuscule entrée, à peine plus grande qu’un placard.

— Vraiment ! fit-elle en ouvrant la porte.

Richard Abbott, le teint terreux, à bout de souffle, les yeux fermés, était appuyé contre la sonnette. Du sang s’égouttait de sa manche gauche sur le paillasson. Il faillit tomber sur elle.

— Richard, dit-elle. Richard…

Il ouvrit les yeux.

— Je peux… me reposer un peu ?

Il vacillait sur place.

— La tête qui tourne, dit-il.

Elle referma les bras sur lui, le soutint pour le conduire au salon. Il était trempé de sueur et de pluie et s’appuyait lourdement contre elle.

Il va salir mon corsage propre, songea-t-elle absurdement. Elle était désemparée, un peu terrifiée, et semblait incapable de maîtriser ses pensées et ses émotions. Mais tout au fond d’elle-même, elle était heureuse. C’était la seule émotion claire et positive qu’elle pouvait identifier. Elle était heureuse et elle le savait. Elle sentait l’amour qu’elle avait jugulé pendant deux ans surgir en elle comme le soleil levant, l’emplissant d’une chaleur et d’une tendresse presque douloureuses. Elle aurait pu pleurer de bonheur. Tu pleureras plus tard, se dit-elle.

Elle l’installa dans un fauteuil et il se laissa aller en arrière, referma les yeux. Son souffle était plus régulier et la couleur revenait sur son visage, mais il s’était mis à frissonner.

Elle alla chercher une couverture en mohair de couleurs éclatantes que sa mère lui avait offerte pour Noël et la posa sur ses épaules. Elle se rappela alors la bouilloire qui devait être en train de bouillir éperdument, courut à la cuisine et prépara une citronnade chaude avec beaucoup de sucre et un peu de whisky.

— Tiens, voilà, citronnade au whisky.

Il but une gorgée.

— Comment te sens-tu ?

— Beaucoup mieux.

— Que s’est-il passé ?

— J’ai été pris dans une bagarre. Avec des supporters de football.

— Quand tu auras bu ça, on va te nettoyer et regarder un peu ce bras.

— Je crois qu’il ne saigne plus.

— Comment as-tu fait ça ?

— En passant à travers une fenêtre, pour éviter la police.

— Il faudra probablement des points de suture. Et tu ferais mieux d’enlever ces vêtements mouillés.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.